Par Jacques Favier le lundi, février 22 2021, 07:00
Cet article fait suite à celui où je retrace ce que je sais de l'histoire de ma propre maison depuis sa construction, à la fin de l'époque révolutionnaire au temps des familles Faburel et Dagincourt.
A cette époque, et pour des gens modestes, mes ressources en termes d'illustration sont faibles. Quelques traces signées sur des registres ou des contrats...
Par contrat passé chez Maître Louis Ambroise Delesque, notaire à Maineville, le 23 mai 1850, Louis-Michel Dagincourt, cultivateur à Sérifontaine, avait vendu pour 2.600 francs ma maison à Pierre « Victor » Tellier, né à Sérifontaine le 5ème jour complémentaire de l’An 6 (21 septembre 1798), journalier devenu lamineur et chauffeur en mines et ainsi qu’à sa femme Marie Victoire Saint-Ouen née le 30 octobre 1797, dentelière qui ne savait écrire ni signer son nom, ce que les Tellier père et fils faisaient quand même avec quelque mal.
Par Jacques Favier le mercredi, avril 8 2020, 08:38
Voici un homme bien élégant, qui fut maire de Sérifontaine peu d'années mais dans des circonstances difficiles, et dont le portrait a déjà été présenté dans mon billet 75.
Le hasard d'une rencontre en ligne, sur un sujet tragique, m'avait aussi donné l'occasion de semer un petit indice, car Monsieur Coratte, comme la malheureuse famille Quoilin, venait des Ardennes, auxquelles la CFM liait décidément notre destin.
Pierre-Fernand Coratte, était né le 8 avril 1857 à Mercy dans le département de l'Allier, dans le petit hameau des Branles.
Avec près d’un siècle de retard sur l’homme qui déchiffra la pierre de Rosette, Sérifontaine a eu son Champollion : Victor Patte.
Celui-ci est surtout le grand historien de Gisors où il finit juge de paix. Mais sa famille était aussi implantée à Sérifontaine (comme le rappelle le calvaire de Bourguerelle). En 1896 il présenta, comme de simples notes historiques sur Gisors, un ouvrage de 580 pages qui ressemble parfois à un long guide touristique coupé de digressions, de longs récits ou causeries historiques et archéologiques. Il avait aussi entrepris une Histoire de Sérifontaine dont ce qui ne devait sans doute être que le début fut publié en 1912 dans le Bulletin de la Société archéologique de l’Oise, tome VIII où elle occupe les pages 133 à 180.
Par Jacques Favier le mercredi, octobre 2 2019, 11:15
Sérifontaine avait connu, depuis 1782, un curé exceptionnel à tous
égards : François Jérosme, qui fut aussi, à tour de rôle ou en même temps
Maire (de 1799 à 1812) et instituteur, inocula la vaccine (en 1810) et mourut
en bienfaiteur en léguant à la Commune le terrain où l'on construisit plus tard
l'école de filles, demandant seulement en échange des messes que naturellement
on s'empressa d'oublier.
Avec son successeur, Guillaume-Amable Bellanger, nommé en 1829, on allait
tomber de haut. Qui se souvient de lui ? Personne sûrement, sauf moi, sans
doute, parce que j'ai l'œil à tout ! Il a laissé pourtant ses initiales
gravées dans le bois. Il a aussi laissé bien davantage de traces comme plaideur
procédurier que comme pasteur des âmes.
Par Jacques Favier le lundi, janvier 8 2018, 21:51
J'ai déjà évoqué ici sur ce que George Sand décrit comme « ces
générations obscures qui passent sur la terre et n’y laissent point de traces
». Pour retrouver la trace de l'un de ces modestes destins, au bout de deux ou
trois générations, il faut un fait divers, un vol, un crime ou ... un
miracle !
Curieusement, si on m'a déjà interrogé sur des souterrains, des fantômes,
des OVNI, des histoires de filiations inavouées et dont je n'entends pas
m'occuper, aucun de mes lecteurs ne m'a jamais interrogé sur le point de savoir
s'il y avait eu miracle chez nous.
Pour retrouver la chose, il
faut lire les gazettes de jadis. La Muse historique est une gazette
écrite en vers, et fondée par un certain Jean Loret au commencement du règne de
Louis XIV, durant la période agitée et révolutionnaire de la Fronde.
Pendant 15 ans, de 1650 à 1665, tous les faits remarquables, politiques,
littéraires, tous les bruits de ville, toutes les nouvelles étrangères qui ont
occupé les esprits ont laissé une trace grâce à ce Jean Loret. Et tout le monde
(y compris le jeune roi) lisait sa Gazette.
"Oui, nous sommes décidés pour Éragny-sur-Epte ;
la maison est superbe et pas chère : mille francs, avec jardin et prés.
C'est à deux heures de Paris, j'ai trouvé le pays autrement beau que
Compiègne ; cependant il pleuvait encore ce jour-là à verse, mais voilà le
printemps qui commence, les prairies sont vertes, les silhouettes
fines."
C'est ainsi qu'au début de 1884, Camille Pissarro rapporte à un de ses fils
son choix de s'installer à Eragny, dans la grosse maison dont il fera
finalement l'acquisition en 1892 grâce à un prêt de son ami Claude Monet et
qu'il ne quittera plus guère jusqu'à sa mort. Des mots simples qui peuvent
émouvoir tous ceux qui, comme le peintre, ont un jour quitté la région
parisienne pour s'installer dans une petite région superbe et pas
chère.
Installation réussie: Je ne suis heureux que lorsque je suis à
Eragny écrit-il au même fils deux ans plus tard.
Au-delà de ces mots, les centaines de tableaux et d'aquarelles que Pissarro
va peindre sans jamais sortir d'un espace fort limité et centré sur son jardin
sont pour nous passionnants à plus d'un titre.
S'il y a vraiment une excursion à offrir ce printemps aux habitants
de nos bords de l'Epte et aux habitués de la 915, les plus jeunes comme les
plus âgés, c'est d'aller revoir ce même paysage au Musée du
Luxembourg à Paris.
Par Jacques Favier le dimanche, novembre 6 2016, 09:51
Un propos démagogique récent voudrait que, si nous voulons être français,
nos ancêtres devraient être
gaulois.
On ne fait pas plus maladroit que l’usage polémique d’une vieille rengaine.
La formule de l'historien Ernest Lavisse (1842-1922) n'en demandait pas
tant :
Il y a dans le
passé le plus lointain une poésie qu'il faut verser dans les jeunes âmes pour y
fortifier le sentiment patriotique. Faisons-leur aimer nos ancêtres les Gaulois
et les forêts des druides (...) tous nos héros du passé, même enveloppés de
légendes car c'est un malheur que nos légendes s'oublient. Un pays comme la
France ne peut vivre sans poésie.
Par Jacques Favier le dimanche, février 14 2016, 09:10
L'une des premières choses que l'on lit, en arrivant par la route à
Sérifontaine, est qu'il y a un « Quartier de la Vigne ». Pourtant nous
sommes plutôt en pays de cidre, et depuis assez longtemps pour que la vigne ait
totalement disparu de notre paysage. Mais ce quartier tient bien son nom d’une
ancienne vigne locale, située comme on le voit sur la carte d'état major.
Mais deux autres vignes ont dû exister jadis. On trouve ainsi sur le
cadastre la vigne Laverine sur les
pentes ensoleillées du fond de Marchanval. Une troisième semble avoir existé à
l’entrée de Droittecourt en face de l’ancien débit de boisson !
Il y eut donc jadis du "vin de Sérifontaine" couvrant les usages
locaux, messe et tables de fêtes.
Par Jacques Favier le samedi, novembre 28 2015, 20:40
Tous les Sérifontainois ou presque la connaissent bien, la "maison du
docteur", qui fut longtemps celle du docteur Claude Valet. Ne dit-on pas qu'il
a accouché près de 600 habitants entre 1947 et 1984 ? J'ai évoqué cette
figure marquante de notre histoire récente dans mon article "médecins et
pharmaciens de Sérifontaine" sur le Bulletin Municipal de novembre
2015.
Ici, je voudrais parler de sa maison, au 53 de la
rue Pierre-Eugène Boyer, l'une des plus belles sans doute, une maison
bourgeoise comme on en trouve davantage à Gisons que chez nous. Qui l'a faite
construire? Qu'a-t-elle de particulier ?
Depuis longtemps, un détail m'intriguait. Je l'avais signalé sur la page
nos
maisons : les initiales sur les grilles. Faites pour
être "lues" depuis la maison et non depuis la rue, elles mêlent un E et
un V.
Par Jacques Favier le samedi, octobre 10 2015, 08:40
Une excellente initiative, la mise en ligne de la conférence de Jérôme Vrel
lors des dernières journées du Patrimoine. Jee pense qu'elle intéressera les
lecteurs de mon blog, et je la mets donc en ligne, en renouvelant mes
remerciements à Jérôme Vrel pour l'aide qu'il ne m'a jamais comptée !
Par Jacques Favier le samedi, septembre 26 2015, 17:39
J'ai profité des "Journées du Patrimoine" de dimanche dernier pour faire un
petit voyage jusqu'à Chaumont, en pensant aux hommes de 1789. J'ignorais alors
que 1789 allait faire l'objet, dans la même semaine, d'un jugement à
l'emporte-pièce à la fois stupide et stupéfiant.
Cela vaut le détour.
Il y a deux sortes d'imbéciles en matière d'Histoire de France. Ceux qui
considèrent qu'elle s'arrête en 89, et ceux qui pensent qu'elle commence cette
année-là. Raison de plus pour revenir tranquillement au destin de notre petit
bourg, et se demander ce qu'y furent les débuts de la Révolution.
Sous l'ancien régime, la paroisse de Sérifontaine relevait du
bailliage de Chaumont, institution dont le souvenir se maintient dans
le nom de la belle maison du bailliage au pied de l'église
Saint-Jean.
Les événements du début de la révolution française sont pour ainsi dire les
derniers pour lesquels notre histoire soit liée à l'antique Vexin avant que la
révolution nous rattache au Coudray puis à Beauvais.
Dans un
guide touristique de 1857 on pouvait lire : Céréfontaine a un château
splendide au dehors, mais actuellement d'une nudité déplorable à
l'intérieur.
Qui compta, dès l'aube de la Révolution, parmi les premiers élus de notre
commune ? Le fermier de Champignolles !
Depuis André Famin en 1789 jusqu'à Patrick Thibaut aujourd'hui,
existerait-il un fil ténu mais tendu à travers toute notre histoire qui fut
tellement industrielle qu'on en aurait oublié ceux qui n'étaient ni meuniers,
ni lamineurs, ni ouvriers? Au commencement, il y eut les moines, au moulin de
Saint-Victor autant qu'à la ferme de Champignolles. De là partent deux
histoires...
Par Jacques Favier le dimanche, février 9 2014, 13:23
Le récit ( billet
précédent) par un chroniqueur castillan de la vie luxueuse et raffinée que
l'on menait à Sérifontaine du temps de Renaud de Trie et de la jeune et belle
Jeanne de Bellengues peut donner le sentiment d'être enjolivé. On va revenir à
ce temps glorieux de notre commune, mais par un chemin plus terre à terre, en
nous intéressant au geste malheureux d'une povre jeune femme cousturière de
linge employée de la jeune Dame de Sérifontaine.
Par Jacques Favier le jeudi, décembre 26 2013, 06:20
Il y a un pays où Sérifontaine fut un mythe littéraire, le cadre princier
d’une incroyable histoire d’amour entre un aventurier et la plus belle femme de
France. Vous n’en croyez rien ?
La Bibliothèque de Madrid conserve le manuscrit d’un célèbre récit
chevaleresque, le Victorial, chronique de la vie de Don Pero
Niño composée par son porte-étendard alors que son héros avait déjà dépassé la
cinquantaine.
Par Jacques Favier le lundi, novembre 4 2013, 08:58
Pour cent briques t’as plus rien !
Les cent millions (d’anciens francs) évoqués dans le titre du film d’Edouard
Molinaro en1982 sont devenus 152.400 euros. Pour ce prix des parisiens
venus plus souvent des lointaines couronnes de notre capitale que de son île
Saint-Louis, peuvent acquérir dans l’Oise une petite maison. Si cette maison
est ancienne, souvent elle est construite en briques.
Dans l’étude commandée par le Conseil Général sur les différents malaises
éprouvés par une grande partie de la population, je lis cette phrase d’une
habitante de Crèvecœur : ici la campagne n’a aucun attrait avec la
brique. Tout paraît pauvre et délabré, il n’y a pas d’arbres et les champs sont
plats. Ça pue.Etc
Par Jacques Favier le jeudi, septembre 5 2013, 07:37
Toutes les traces écrites de notre passé ne sont pas conservées dans les dépôts d’archives, et de nombreux documents passent de main en main, au gré des successions, des pertes ou des trouvailles. On pouvait trouver des petits bouts de la mémoire de Sérifontaine en vente, il y a peu de temps encore chez les libraires spécialistes de vieux papiers. Ainsi les Archives de l’Oise ont-elles pu acquérir en 2010 un ensemble d’environ 240 pièces manuscrites, du 16ème au 18ème concernant la famille de Flavacourt. J’ai consulté ce carton à Beauvais : on y trouve pêle-mêle des comptes et des mémoires de travaux, la quittance d’un cercueil d’une de nos « dames » morte en 1718 ou bien une facture pour la réparation du moulin de Saint Victor...
Internet devient un marché autrement plus vaste que ne l’était celui des marchands de vieux papiers, et récemment c’est moi qui ai pu acquérir une pièce étonnante : le bail datant de 1751 par lequel le Marquis de Flavacourt donne en fermage rien de moins que la ferme du château de Sérifontaine. C’est un jeune professeur d’histoire originaire de Franche-Comté et exilé dans un lycée de Picardie, Monsieur Arnaud Dochtermann qui m’a révélé l’existence de ce document que j’ai décidé de mettre en ligne, non parce qu’il est entré dans ma collection mais par ce qu’il me paraît particulièrement intéressant.
Pour me faire pardonner mes escapades dans l'actualité, j'ai consacré une partie de mes vacances à remonter plus loin que d'habitude dans le passé : au temps des Vikings !
On cite souvent la charte du 14 mai 918 dont il va être question comme la première mention historique de Sérifontaine (depuis la Géographie de l'Oise par Badin en 1847 ou le Dictionnaire de Toponymie de Lambert en 1963 et jusqu'au chartiste Marcel Baudot, Inspecteur Général des Archives de France en 1983) . Ceci avec de très nombreuses conséquences, tant pour l'histoire de notre commune que pour la signification de son nom, sujet que je n'aborderai toujours pas ici.
Par Jacques Favier le vendredi, mars 15 2013, 00:01
Le Pape à Sérifontaine ? On sait qu'en 1119 le pape (français) Calixte
II se rendit à Gisors pour tenter de régler un différent entre les rois de
France et d'Angleterre. Mais on n'a aucune trace que ses pas le portèrent chez
nous.
Pourtant on trouve bien plus tard une (fort discrète !) intervention
pontificale dans l'histoire de Sérifontaine. C'est un tout petit détail, et je
l'ai trouvé dans un endroit tout à fait imprévisible : dans L'Histoire
de ma Vie de George Sand (1804-1876).
Par Jacques Favier le dimanche, mars 3 2013, 09:07
Il y eut jadis, à Sérifontaine, une statue présentant les attributs des deux
sexes : on disait un Hermaphrodite en un temps où la culture se
nourrissait encore des grands récits mythologiques. Hermaphrodite avait en
effet hérité son nom de ses deux parents, Hermès et Aphrodite; mais quant à
leurs deux beautés qu'il unissait en un seul corps, il semble qu'il les ait
dues non à la génétique mais à une sombre vengeance d'une nymphe dont il aurait
niaisement repoussé les avances.
En 1608 on découvrit à Rome un Hermaphrodite de marbre datant sans doute du
deuxième siècle de notre ère. Acquise par le cardinal Borghèse, l'oeuvre qui
fascina immédiatement toute l'Europe en garda le nom. Ce cardinal lui fit en
1620 sculpter un lit de marbre par le Bernin. En 1807 la statue fut cédée par
le prince Borghèse, époux de Pauline Bonaparte, à son impérial beau-frère, qui
l'installa au Louvre.
Par Jacques Favier le mardi, janvier 8 2013, 22:32
Avec les voeux s'échangent de petits présents. J'en ai reçu un que je
souhaite partager avec tous ici. Mon ami Bruno Nardeux, professeur d'histoire
dans un lycée parisien et grand connaisseur de Lyons-la-Forêt et des parages
normands entre Lyons et Sérifontaine, vient de trouver et de me communiquer la
trace de ce qui est non seulement l'une des rares, mais peut-être la première
visite royale dans notre petite ville.
Un recueil établi par le chartiste Michel Nortier indiquait en effet que le
roi Jean II le Bon s'était arrêté à Sérifontaine le 8 janvier 1353. Trouvant
ceci au hasard de ses propres recherches, Bruno Nardeux s'est rendu pour nous à
la Bibliothèque Nationale, rue Richelieu, et a retrouvé et photographié l'acte
en question.
L’Eclaireur a consacré un bel article (cliquez sur l’annexe) à l’un
des nos amis et à sa passion des figurines militaires napoléoniennes :
Bernard Bouffart, un grognard de plomb .
Aujourd’hui, il n’est pas forcément bien vu d’aimer Napoléon : il faut
se justifier sur des questions que l’on ne se posait pas quand Bernard Bouffart
ou moi étions gamins. Parmi les lecteurs de ce blog, il y en a sûrement que le
culte de l’homme au petit chapeau indiffère ou révulse. Sur Napoléon on a
peut-être écrit un livre par jour depuis sa naissance, mais cela n’empêche
point ceux qui ne lisent guère de dire des bêtises ou de proférer des jugements
anachroniques et désinvoltes.
J’ai mon opinion, forgée par des lectures nombreuses. J’avoue que le
dieu de la guerre m’impressionne moins que le politique profond qui
disait « Je ne gouverne pas parce que je suis un général, mais parce
que la Nation croit que j'ai les qualités civiles nécessaires pour
gouverner ». Mais il y a quelque chose de généreux à aimer la gloire
d’antan, et quelque chose de pingre et de coincé qui m’inquiète chez ceux qui
pinaillent cette gloire. Plus profondément (car je sais bien que certains vont
extrapoler mes dires) j’ai observé qu’à son époque l’immense majorité de ceux
qui ont détesté l’empereur étaient viscéralement hostiles à l’égalité civile, à
la souveraineté nationale, aux acquis et aux principes de la Révolution.